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Tant que ces trésors se conservent, et que la corruption n'a pas pénétré là, quand même elle aurait déjà entamé les extrémités élevées, les classes riches, rien n'est désespéré pour un pays; tant que le sang du peuple est sain et pur, il peut, infusé dans les veines du corps social, régénérer encore une société. Mais si ces sources mêmes de la vie nationale étaient gâtées aussi et corrompues, ce serait dans un peuple la décadence irrémédiable, la décomposition certaine et prochaine.» S'élevant contre le terme de _classes privilégiées_ qui semble ne faire résider le bonheur que parmi les riches de la terre, Mgr d'Orléans nous rappelle que l'ouvrier ou le paysan chrétien qui peut, par le travail, lutter victorieusement contre la pauvreté, goûte dans sa famille les joies les plus pures et les plus vives. L'évêque voit Dieu même s'asseoir à cet humble foyer; et c'est avec une religieuse émotion que l'illustre prélat a souvent contemplé ce spectacle dans les montagnes de sa chère Savoie et dans les campagnes de son diocèse. Mais, pour que Dieu règne sous ce toit, il faut que la femme sache soigner et garder la maison. Il faut qu'une bonne et religieuse éducation, qu'une instruction appropriée à son état, la prépare à sa rude, douloureuse et bienfaisante mission d'épouse et de mère. Et quand elle est bien remplie, cette mission, le grand évêque s'incline «avec un respect infini», devant l'humble et laborieuse femme du peuple, et il l'élève bien haut au-dessus de la femme du monde, inoccupée, frivole, qui, non seulement n'est pas utile comme celle-là, mais devient nuisible à elle-même et aux autres. Cependant, si la femme honnête et active est pour le paysan ou l'ouvrier le soutien et l'honneur de la vie, quel fléau est pour cet homme la femme paresseuse et insouciante qui, par son défaut d'ordre et d'économie, amène la ruine de la famille! Dans toute condition, il faut éviter le désoeuvrement; et loin de nuire aux devoirs de la maîtresse de la maison, le travail intellectuel aide à les remplir. La piété seule n'y suffit point si elle elle n'a pour base une solide instruction religieuse. L'étude éclaire la raison, forme le jugement, fait disparaître les goûts futiles, et par la peine qu'elle coûte et les habitudes qu'elle impose, fortifie le caractère et imprime à la vie cette régularité sans laquelle l'existence n'est qu'un rêve et souvent un mauvais rêve. La femme instruite et sensée devient pour son mari une sage conseillère qu'il estime, et pour ses enfants un guide qu'ils vénèrent. Mais il faut alors que l'instruction qu'elle a reçue ait plus affermi sa raison qu'orné son intelligence. La femme appliquée, studieuse, exercera de nos jours plus qu'une influence domestique, une influence sociale, et ce ne sera pas seulement comme mère éducatrice. Au lieu d'encourager son mari à l'oisiveté, comme le font trop de femmes aujourd'hui, elle le poussera vers les nobles carrières qui lui permettront d'être utile à la patrie, à la religion. Le travail est une loi divine pour tous. Par la sentence de l'Éden, le riche y est soumis comme le pauvre. Et aujourd'hui que le socialisme est l'une de nos plaies, l'évêque fait remarquer combien l'exemple du travail, exemple donné par les hautes classes, sera bienfaisant pour l'ouvrier. Celui-ci peut regarder avec une haine envieuse l'oisif qui jouit de tout sans se donner la peine de rien, tandis que lui, courbé sur une rude tâche, gagne à la sueur de son front le pain quotidien. Mais il considérera d'un oeil plus bienveillant l'homme qui ne se croit pas dispensé du travail par sa fortune. C'est aux femmes qu'il appartient de «réhabiliter le travail», dit l'évêque, qui ajoute: «En cela, comme en toutes choses, il faut que l'exemple vienne de haut; car en cela, comme en religion et en morale, les hautes classes doivent à la société et à la patrie une expiation. Le xviiie siècle, avec sa corruption, ses scandales, son irréligion, pèse encore sur nous de tout le poids d'un satanique héritage. Comme le péché originel, ces fautes ont été lavées dans le sang, c'est l'histoire de tous les grands égarements. Mais il reste à expier le désoeuvrement, l'inaction, l'inutilité, l'annihilation auxquels on s'est voué et dont on a donné le funeste exemple.» Mgr d'Orléans conseille particulièrement aux femmes d'aider leurs maris dans les exploitations agricoles. Pour cela, il faudra qu'elles aient le courage de sacrifier à une existence aussi austère que douce les plaisirs mondains si enivrants, mais si amers! Aujourd'hui qu'un courant malsain entraîne vers les villes les populations rurales, il est plus que jamais utile que les châtelains, demeurant au milieu des paysans et dirigeant leurs travaux champêtres, leur enseignent par ce grand exemple que rien n'honore plus l'homme que la culture de la terre, et que la charrue forme avec la croix et l'épée le plus glorieux symbole d'une nation. L'épée! Naguère, c'étaient les femmes qui en armaient elles-mêmes leurs fiancés, leurs époux. Aujourd'hui, ce sont elles qui souvent les en désarment; et cependant c'est aujourd'hui surtout que l'honneur de la France a besoin d'être gardé par de vaillantes mains. L'évêque adjure les jeunes filles et leurs familles de ne plus exiger qu'un fiancé quitte le service militaire. Que la femme s'honore d'être la compagne d'un officier français; qu'elle le suive dans les villes de garnison; et si le danger de la patrie l'appelle à la frontière menacée, ou si, marin, il doit s'exposer aux périls d'une traversée lointaine, qu'elle sache souffrir les angoisses de la séparation, et qu'elle attende ce retour dont bien des femmes ont retracé à notre évêque les ineffables joies. Tandis que par sa propre activité et par ses généreux conseils la femme donnera à son mari l'impulsion des travaux utiles et ne lui fera pas perdre le goût des nobles carrières, elle aura aussi appris par l'étude à faire tomber de sa douce voix les préjugés qui, à son foyer, peuvent s'élever contre la religion. Souffrir, se taire ou s'irriter, c'est là, en général, tout ce qu'elle peut faire aujourd'hui quand elle voit attaquer autour d'elle ses plus chères croyances. En devenant pour son mari une compagne avec laquelle il sera en pleine communauté intellectuelle, la femme studieuse le détournera de ces clubs, où trop souvent l'ennui de vivre avec une femme frivole pousse bien des hommes. Ainsi, chez les Athéniens, l'ignorance de la femme honnête préparait le règne de la courtisane lettrée. La femme studieuse retiendra aussi près d'elle, par le charme d'une conversation attachante, les amis de sa famille, qui désertent ces salons sans vie où ne s'échangent que des paroles vaines. Quelle influence sociale peut exercer alors une maîtresse de maison qui saurait faire circuler autour d'elle un courant d'idées élevées, de sentiments généreux! On verrait revivre nos salons français d'autrefois avec leurs conversations exquises. La littérature, les arts redeviendraient les manifestations du beau dans ce que ce principe a de plus grand, de plus pur, de plus délicat. Que de forces le matérialisme perdrait ainsi dans la vie morale, intellectuelle et artistique de notre pays! C'est ainsi que par la femme, une nation redevient laborieuse, croyante et vraiment forte, grande et glorieuse. Telle est, outre sa mission domestique, la mission sociale réservée à la femme d'après le plan divin que lui retrace l'évêque d'Orléans. Mais par quels moyens préparera-t-on la jeune fille à remplir sa place dans le plan divin? Quels sont les principes supérieurs qui illumineront pour elle cette instruction dans laquelle elle ne voit qu'une suite de faits et de dates? Ces principes supérieurs peuvent être ramenés à un seul: la raison éclairée par la foi. Ce principe qui substituera à la faiblesse naturelle de la femme la force morale, dirigera sûrement les élans de son intelligence et réglera les mouvements de son coeur. La réflexion dominera l'impressionnabilité; la piété solide, agissante, remplacera la dévotion superficielle. Ainsi réglée, la vie de l'âme n'en sera que plus puissante. «Il faut un sol granitique, me disait un jour l'évêque d'Orléans, ce qui n'empêche pas le regard d'embrasser le plus vaste horizon.» Mais, pour que la mère ou l'institutrice puisse imprimer une pareille direction à ses élèves, elle doit l'avoir suivie elle-même. Il faut qu'elle possède la vraie lumière intellectuelle. Si elle ne l'a pas encore, qu'elle l'acquière. L'évêque rappelle éloquemment aux femmes que la lumière du monde, c'est Dieu même; et qu'en allant à cette lumière, c'est à leur divin Maître qu'elles iront. Et, pour les guider vers Dieu, cette lumière est aussi en elles-mêmes. Avec saint Thomas d'Aquin, Mgr d'Orléans leur enseigne «que la vraie raison est en nous, comme la foi, une participation de la lumière divine, une impression sublime de l'éternelle lumière, l'illumination même de Dieu.» Après avoir ainsi développé en elle «le fond divin, le fond éternel», que Dieu a mis dans la femme, la mère ou l'institutrice saura donner pour base à l'éducation de son élève la raison dirigée par la foi. Cette base, il faut la poser dès l'enfance. Il faut habituer la petite fille à connaître et à pratiquer le devoir, et ne rien lui ordonner qu'au nom des commandements de Dieu. L'évêque souhaite aussi qu'au lieu de s'abaisser par un langage enfantin au niveau de ces petites intelligences on les élève jusqu'à soi par un langage simple sans doute, mais noble: les enfants comprennent. Dans sa carrière de catéchiste, Mgr d'Orléans l'a souvent expérimenté. Ce père des âmes savait que, pour l'enfant comme pour l'homme du peuple, une parole grande et vraie est l'aimant qui attire les âmes; et, à ce contact magnétique, celles-ci, s'éveillant ou se réveillant, s'écrient: _Adsumus_, nous voici! Les âmes d'enfants, ces âmes «encore dans l'innocence baptismale», sont si promptes à reconnaître dans ce qui est beau et bon le Créateur qui vient de les mettre à la lumière! Les petites filles surtout, l'évêque le remarque, «ont la passion du sublime, parce que leur esprit est plus angélique que celui des petits garçons.» Qu'on alimente donc dans ces jeunes âmes cette passion généreuse. 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